Gironde, pays de pierre

Au SDA Gironde, nous avons inventé cette formule pour orienter notre action. Comment émettre des réserves sur nos avis, émettre des prescriptions sur les matériaux, si les maires, les artisans, la population ne les considèrent pas comme importantes.

Et ce, qu’il s’agisse de l’entretien des MH ou d’une intervention dans les abords de ceux-ci. Peut-on avoir la conscience tranquille quand notre patrimoine se trouve irrémédiablement dégradé à chaque intervention d’entretien.

Alors que le CAUE a pour objectif de sensibiliser et promouvoir la qualité de la conception architecturale, nous avons pensé que nous devions établir un débat permanent sur une redécouverte des techniques traditionnelles. Débat à l’occasion du chantier, mais surtout à partir d’une exposition très technique et pédagogique sur les problèmes de la pierre qui compose 90 % du bâti ancien du département ; carrières, restauration, mise en œuvre, maladies. Cette exposition, financée par le Conseil général, comprenant vingt-sept panneaux construits (textes, croquis, photos) par le SDA Gironde, se déplace dans les cantons du département depuis trois ans. C’est à chaque fois l’occasion d’une inauguration présidée par le maire et le conseiller général, parfois, le sous-préfet ou le président du Conseil général qui, s’ils ne sont pas encore tout à fait à l’aise avec ce thème de discours, sont de plus en plus sensibilisés par notre mission, comprenant ainsi, petit à petit, le message de la pierre. Nous sommes aidés par un audio-visuel de vingt minutes pour animer deux débats auprès des artisans locaux et des commerçants et dont les thèmes peuvent varier suivant les caractéristiques du canton.

Pour concrétiser ce discours sur la pierre, nous encourageons et encadrons certains chantiers favorables qui seront des références pour permettre à chacun de comprendre, d’analyser ou de reproduire quelque chose qui existe. Plus récemment, à l’occasion d’un concours portant sur notre action, le président du Conseil général a récompensé vingt-cinq chantiers réalisés dans le département, sur sept thèmes différents :

  • architecture commerciale en milieu urbain
  • entretien des façades en pierre de taille
  • entretien des façades en moellons-enduits
  • restauration légère de bâtiments anciens
  • restauration lourde de bâtiments anciens
  • réhabilitation de bâtiments anciens
  • architecture contemporaine en pierre.

En présence de quatre cents personnes, vingt-cinq maîtres d’ouvrage, vingt-cinq artisans et vingt-cinq maîtres d’œuvre ou architectes ont été récompensés, à l’appui d’une projection géante de leur œuvre et d’un commentaire.

Exposition, réalisation, concours représentent une “officialisation” des techniques traditionnelles et de tous les problèmes concernant le bâti ancien. Utiliser ces techniques ou les demander devient sérieux, aussi bien pour les artisans que pour les politiques, puisque les officiels, préfet, président du Conseil général, SDA ou Sud-Ouest (journal local) en parlent. Ce n’est plus “rétrograde”, à tel point qu’un Centre régional de la pierre, soutenu par le ministère de la Culture est en train de se mettre en place. À tel point que dans le programme du concours de l’Hôtel de Région, on souhaite l’emploi de matériaux régionaux : la pierre. À tel point que dans le IXe Plan, on propose la filière “pierre”.

Aujourd’hui, nous avons gagné d’être plus connus car nous nous sommes présentés nous-mêmes et bien sûr favorablement, mais aussi d’être mieux compris dans nos idées de conservation et de mise en valeur du bâti ancien. Cette action, à l’échelle du département, a permis une prise de conscience sur ce que l’on appelle le “patrimoine de tous les jours” et la nécessité de la qualité de son entretien. Le SDA Gironde pense continuer cette action de sensibilisation au travers des ZPPAU (Zone de Protection du Patrimoine Architectural et Urbain). C’est l’occasion, au cours des groupes de travail, pour les élus de mieux comprendre leur patrimoine et pour la population, de participer à des conférences dans le cadre d’une exposition qui présente l’étude. Dans le fond, notre mission est celle d’un “représentant de commerce” et combien c’est facile et agréable lorsque l’on “vend” la qualité avec des arguments honnêtes.

Jean-Pierre ERRATH

Dans le même dossier