Édito

L’eau et le feu

Le Nord-Pas-de-Calais est la plus dense des régions françaises et le département du Nord le plus peuplé du territoire national, avec environ deux millions six cent mille habitants. Ce n’est pas la première région à laquelle on pense quand on entend les mots “patrimoine”, “paysage”, “aménagement qualitatif du cadre de vie”… Cette région, pleine de contrastes, à l’histoire plus mouvementée que le relief, a un contour administratif qui est encore moins qu’ailleurs celui d’un “pays” ou d’une province. La réalité territoriale de cette partie de l’Europe, fragmentée et bousculée par l’histoire, commence en effet dans l’actuelle Picardie et se prolonge jusqu’aux Pays-Bas. L’eau, omniprésente, a façonné autrefois falaises, vallées et marais tandis que, plus récemment, le reflux des activités industrielles, principalement liées au charbon, a laissé de profondes marques.

De ce fait, la région est immédiatement associée dans l’imaginaire collectif à urbanisation et cicatrices industrielles. Des ressources patrimoniales et culturelles d’un grand intérêt sont ainsi occultées par un déficit d’image que les collectivités, soutenues par les services de l’État, s’emploient à faire disparaître en valorisant autant le passé industriel régional que des paysages originaux et méconnus. Lille 2004, le Grand Site des Deux-Caps, le Louvre-Lens où la reconnaissance par l’Unesco du bassin minier témoignent de cette activité commune. Sur cette terre de contrastes, des vestiges de l’activité industrielle tels que chevalements, infrastructures (canaux), formes urbaines (cité minières) et des paysages spécifiques (terrils) côtoient et s’intercalent parmi des églises, châteaux, cités historiques et plus de cent soixante sites naturels protégés. Cependant sa situation stratégique en Europe, sa position frontalière, son secteur à fort potentiel éolien, la concentration de voies de circulation et un besoin important de logements sont autant de raisons de confrontation du patrimoine régional avec des enjeux de développement. C’est l’occasion de mettre toutes les facettes de la structure patrimoniale au service de la qualité du cadre de vie pour mieux ancrer l’avenir et la valoriser en retour.

Philippe CIEREN
Rédacteur en chef

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