De l’entrepôt aux bureaux, l’architecture peut encore faire rêver

Maîtrise d’ouvrage : Carlyle Reat Estate
Maître d’œuvre : atelier d’architecture Franck Hammoutène, Paris
BET : Bouygues et C&E Ingénierie
Shon: 23 600 m2 ; 32 & 36, rue Blanche
Coût: 2 300 € HT/m2, y compris démolitions et curages

Réputé pour ses projets urbains contextuels, l’architecte Franck Hammoutène vient de transformer les anciens entrepôts d’un grand magasin parisien en un espace de bureaux. Il a su saisir le sens du bâti originel, en a conservé l’ossature, le faisant entrer de plain-pied dans le monde rationnel des nouvelles entreprises.

Un langage moderne et poétique

Construit en 1910, l’immeuble fortement enclavé ne laisse pas espérer sa surface de vingt trois mille m2 depuis la façade sur la rue Blanche. Pour répondre au programme (mille trois cents m2 de logements sociaux et vingt deux mille m2 de bureaux), les architectes ont mesuré les potentialités du site et ses contraintes. Ce diagnostic a innervé leur projet, qui reprend les structures porteuses en métal et les descentes de charges, utilise la façade identitaire dans un langage résolument moderne et poétique, Compte tenu de la profondeur de l’îlot, le défi consistait à baigner de lumière les plateaux en dépit de leurs vastes dimensions. Ce fut résolu par la création d’un atrium au centre et la répartition des noyaux de circulation dans les parties aveugles. Virtuosité ou humour, même l’auditorium de cent soixante places, au plus bas de l’édifice, jouit de la lumière du jour, grâce au jeu des parois de verre. Une autre difficulté liée à la pente de la rue exigeait du doigté : offrir une entrée sécurisée à des utilisateurs nombreux (mille cinq cents) suivant les plages horaires. L’exemple des théâtres en contre-bas où l’afflux des spectateurs gagne la rue servit sans doute de repoussoir. En l’occurrence, le hall est remis au niveau de la rue par un élégant biais où viennent se caler successivement le vide de la façade écran des premiers étages, puis les jardins suspendus des derniers niveaux.

L’espace d’accueil, situé légèrement en contrebas de l’entrée, assure la répartition des flux et découvre d’emblée le leitmotiv de l’architecture. Au puits central de lumière qui développe son cercle magique sur trente-cinq mètres de haut, répond la fresque végétale de Carole Benzaken, La plasticienne a conçu des panneaux de verre bleu froid qui multiplient les points de vue, en opposition avec la lumière du soleil captée au tréfonds de l’édifice. Un dispositif de pendeloques de verre montées en cascade sur toute la hauteur du puits fracture, comme une sculpture, la géométrie du cercle et masque, par ses miroitements, les vues directes entre les bureaux. Au sommet, une terrasse de mille m2, sécurisée sans rambarde, surprend par le couronnement du patio : un anneau de béton surmonté d’un dragon d’acier. Une occupation de qualité qui fait oublier la pénurie de logements.

Franck HAMMOUTÈNE
architecte