Éditorial

Aux marches du patrimoine

Limite fluctuante, la frontière tient autant aux réalités nationales qu’à une solidarité des populations. Les relations ne s’interrompent jamais ; elles s’effectuent dans la clandestinité et l’effroi ou s’épanouissent dans un lent échange économique et artistique.

Autorité étatique et survie au quotidien s’opposent aux frontières et de cette dialectique naît et renaît un territoire aux “eaux mêlées”. Les frontières ne sont jamais naturelles. Leur existence même invite au franchissement et il n’est pas de lieux plus perméables, suscitant migrations, transhumance, contrebande. Ces lieux qui n’appartiennent à personne cristallisent un besoin d’ailleurs, de liberté et de tolérance. Dans les zones frontalières, inexorablement solidaires à travers conflits et intérêts communs, s’élaborent à l’aube de ce nouveau millénaire non seulement une mémoire vive, mais un dynamisme fédérateur. Leur patrimoine commun et leur culture collective offre à l’Europe en devenir le choix d’une direction neuve.

De la mer du Nord aux sommets des Pyrénées, les hommes de l’art se prêtent à de nouveaux itinéraires et quand, après le mur de Berlin, le Rhin s’offre à leur imaginaire, il s’agit d’un accord sur ses deux rives. Les architectes des bâtiments de France, s’ils exercent dans des limites fixées par la loi, n’entendent pas ces dernières comme des frontières entre l’espace de l’interdit et celui du permis. De leur formation, ils ont conservé l’esprit d’aventure et ainsi accompagnent, aujourd’hui, les projets européens de demain.

Bruno STAHLY
Rédacteur en Chef

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