Parc national de la Réunion

Après la Nouvelle-Calédonie en 2008, l’outre-mer français est à nouveau à l’honneur avec l’inscription sur la liste du Patrimoine mondial le 1e août dernier, des pitons, cirques et remparts de lle de La Réunion.

La trente-quatrième session du comité du Patrimoine mondial, réunie à Brasilia, a reconnu que ces richesses naturelles constituaient un paysage spectaculaire contribuant significativement à la conservation de la biodiversité terrestre des Mascareignes. Le site répond aux critères VII et X de la Convention pour les biens naturels, selon lesquels il doit présenter « des phénomènes naturels ou des aires d’une beauté naturelle et d’une importance esthétique exceptionnelles » et contenir « les habitats naturels les plus représentatifs et les plus importants pour la conservation sur site de la diversité biologique ».

La France compte dorénavant trente-cinq sites reconnus par l’Unesco pour leur valeur universelle exceptionnelle, dont trois au titre des biens naturels.

Définition géographique

Ce site coïncide avec la partie centrale du Parc national de la Réunion créé en 2007. Le dossier de candidature a été porté par l’établissement public et a bénéficié d’une forte mobilisation de nombreux partenaires locaux : institutionnels, associatifs et privés. Le site inscrit couvre une superficie de cent cinq mille huit cent trente-huit hectares représentant 42 % du territoire insulaire. Dominé par deux pics volcaniques, il présente une grande diversité d’escarpements, de gorges et de bassins boisés servant d’habitat naturel à une importante variété de plantes présentant un degré d’endémisme élevé. Il s’étage depuis la côte littorale et la Grande Chaloupe jusqu’au piton des Neiges qui culmine à trois mille soixante-et-onze mètres. S’y ajoutent le piton d’Anchain dans le cirque de Salazie, le piton de Sucre et la Chapelle dans le cirque de Cilaos et Mare Longue dans le sud. Les fonds des cirques de Salazie et de Cilaos, ainsi que la plaine des Palmistes, constituent des zones tampons correspondant sensiblement aux trois grands secteurs urbanisés du centre de l’île.

Un plan d’action nationale

Figurer sur la liste du Patrimoine mondial apporte à l’évidence notoriété et prestige. En contrepartie, il s’agit de reconnaître sa responsabilité envers la communauté internationale et de tout mettre en œuvre pour assurer le maintien de l’intégrité des lieux. Le Parc national a donc pour mission de préserver des paysages exceptionnels qui ont été également classés hauts lieux de biodiversité mondiale. Cette inscription n’apportant pas de réglementation spécifique, le Parc doit garantir la conservation du bien, en veillant notamment au respect de la réglementation en vigueur. L’élaboration d’une charte de gestion devrait prochainement permettre de pallier certaines carences en termes d’intervention au sein du site protégé.

Les différents services de la DRAC ont été sollicités pour participer au comité chargé de rédiger cette charte. Le Service du patrimoine, de l’architecture et de l’urbanisme (anciennement SDAP) a notamment travaillé en étroite relation avec le groupe de travail en charge du patrimoine architectural et du paysage construit. Une attention particulière a été portée au traitement des extensions de bourgs afin de les intégrer au mieux dans le site.

Par ailleurs, une convention est sur le point d’être signée entre la DRAC et le Parc afin d’engager des recherches archéologiques et d’établir une carte de repérage. En effet, dès le XVIIIe siècle, les cirques ont été le lieu de refuge des esclaves en fuite, les Marrons (de l’espagnol cimarrôn “vivant sur les cimes”). Ces fugitifs furent les premiers habitants de ces territoires difficiles d’accès.

Le Parc et ses partenaires valorisent la somme des connaissances scientifiques acquises au cours de l’élaboration du dossier de candidature pour enrichir les actions pédagogiques et les produits touristiques : animateurs du patrimoine, classes à projets artistiques et culturels, circuits de visites thématiques…

Le 20 septembre dernier, Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, Chantal Jouanno, secrétaire d’État chargée de l’Écologie, et Yves Dauge, président de l’association des Biens français du patrimoine mondial, ont signé la charte portant engagement national sur la gestion des biens inscrits sur la liste dudit patrimoine. Cette charte précise les rôles respectifs de l’État et des collectivités territoriales en matière de protection et de valorisation du patrimoine mondial. Il s’agit notamment de définir des plans d’action rassemblant l’ensemble des acteurs institutionnels et des partenaires associatifs.

Cette volonté de rassemblement n’est malheureusement pas toujours de mise. Des trois cirques réunionnais, seul celui de Mafate avec son cœur habité a été totalement intégré au bien Unesco. Uniquement accessible à pied ou en hélicoptère, ce cirque du bout du monde accueille huit cents habitants répartis en douze îlets, dénomination locale des hameaux. Chaque année, plus de quatre vingt mille randonneurs en empruntent les sentiers escarpés. Cette importante fréquentation et l’évolution des besoins, tant en logements qu’en équipements de la population, ne sont pas sans générer quelques conflits d’intérêt. En effet, le Parc se doit de maintenir l’intégrité du site sans pour autant bloquer l’évolution des personnes qui y vivent et l’animent. La crainte sous-jacente des Mafatais étant de devoir vivre dans une réserve qui les obligerait à rester dans une bulle hors du temps. Des inquiétudes similaires avaient été observées chez les habitants de la vieille ville de Lamu, au Kenya, lorsque la ville avait été inscrite sur la liste du Patrimoine. Gageons qu’une gestion éclairée puisse éviter ces écueils afin de permettre que la nécessaire exigence de qualité induite par cette récente reconnaissance internationale puisse harmonieusement convenir aux attentes et aux besoins des populations locales.

Vincent CASSAGNAUD
ABF, chef du SPAU Réunion

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