L’Île-Saint-Denis, une île connectée

Séquences monofonctionnelles dans l’Île Saint-Denis. © Agence Philippon-Kalt
Séquences monofonctionnelles dans l’Île Saint-Denis. © Agence Philippon-Kalt

L’Ile-Saint-Denis, source d’inspiration pour les impressionnistes, est aujourd’hui un territoire impacté par un siècle d’activités : lignes à haute tension, autoroute en viaduc, pollution. L’objectif de la requalification du site des entrepôts de L’Île-Saint-Denis était de créer une ville active et résiliente s’inscrivant dans la dynamique du territoire .

Cette commune insulaire s’est développée à la fin du XIXe autour des ponts. Puis, elle s’est sédimentée en séquences monofonctionnelles : équipements sportifs, parc et réserve Natura 2000, activités. Le site des entrepôts s’étire ainsi sur 1,5 km entre les deux quartiers habités de l’île. Sa superficie, de 22 ha, équivalente à celle du parc, représente 1/5 de la commune. Ses grandes emprises foncières monopolisent toute la largeur de l’île, qui n’excède pas 250 m.

Les entrepôts du Printemps alors en activité. © DR

Ces activités représentaient jusqu’en 2006 plus de 1 000 emplois pour cette ville de 7 000 habitants. Elles constituaient un lieu actif et animé qui perdure dans la mémoire collective. Les fermetures des entrepôts du Printemps en 1998, puis des Galeries Lafayette en 2007, ont laissé en héritage une friche de 13 ha. Ce secteur, vidé de ses fonctions, est alors apparu comme une enclave dans la ville. Ce constat offrait l’opportunité de repenser durablement le développement de la ville en valorisant ses contraintes en atouts.
L’enjeu principal du projet urbain était d’ouvrir cette ville insulaire sur les communes situées au-delà du fleuve et d’assurer un continuum urbain animé entre les deux quartiers d’habitat pour créer une ville active et passante.
La passerelle, projetée à l’origine du projet pour relier le cœur de l’éco-quartier à Saint Denis, prend tout son sens aujourd’hui avec le projet du hub du Grand Paris sur le site de Pleyel. Elle apporte une visibilité à ce croissant de terre ; l’île se positionne comme un lieu de destination et non un simple lieu de transit. Cette valeur est affirmée par l’intégration de l’éco-quartier au site Saint Denis Pleyel /Saint Ouen pour le village des athlètes, dans le cadre de la candidature de la France pour les Jeux Olympiques 2024. Ce secteur, situé sur trois communes mitoyennes, constituera alors une ville autonome dans le territoire, le temps des jeux.
Pour renforcer son attractivité et favoriser les échanges entre ilodionysiens, nouveaux arrivants et visiteurs, le nouveau quartier s’organise autour de polarités. Leurs programmes complémentaires s’ancrent dans le contexte urbain : scolaire et multi-générationnel près du centre ville, commercial, adossé à Marques Avenue, ludique au centre de gravité du nouveau quartier, culturel et nautique au débouché de la passerelle…
Les propositions spécifiques, adaptées au contexte insulaire, favorisent les expérimentations. Sur ce territoire étroit et linéaire, les espaces publics sont réservés aux modes doux. Les stationnements mutualisés dans des centrales de mobilité favorisent le développement de pratiques de déplacement liées au partage et aux échanges : covoiturage, auto-partage, pédibus. Ces pôles modaux, intégrant des services et des espaces dédiés à l’économie sociale et solidaire, constituent de nouveaux lieux d’intensité urbaine.
Le quartier tourné vers la Seine favorise les activités et déplacements en lien avec le fleuve. Des séquences aux ambiances contrastées se succèdent, offrant des usages et des activités variées. Les berges adoucies, redessinées au gré des crues et des épisodes pluvieux, favorisent le développement d’une ripisylve riche en biodiversité. Le jardin valorise l’espace situé au droit de l’A86 en recomposant une continuité biotique entre les deux berges. Ces aménités participent à la qualité de vie.

La grève : la ville se tourne vers le fleuve grâce au remodelage de la topographie. © Agence Philippon-Kalt

Cette programmation et ces aménagements incitatifs ne peuvent cependant remplacer l’investissement de futurs habitants actifs et engagés dans la définition de leur cadre de vie. Ainsi, plusieurs acteurs jouent un rôle majeur dans le bien vivre et la bonne appropriation du nouveau quartier. On peut citer les familles des opérations d’habitat participatif, les citoyens investis dans les réunions de concertation et de définition des espaces publics, mais aussi les associations. Ainsi Bellastock, une association d’étudiants, présente sur le site depuis la déconstruction des entrepôts, développe des activités avec les habitants, les enfants des écoles, les étudiants en lien avec le réemploi. Ils contribuent à faire vivre ce lieu pendant la période transitoire entre dé et re-construction, en créant un espace d’expression ouvert à tous.

Quatre polarités à la programmation dictée par le contexte urbain. © Agence Philippon-Kalt
Les QR codes rétroéclairés constituent des balises urbaines. © Agence Philippon-Kalt

Parallèlement, un réseau de communication via des QR codes fait lien entre les acteurs du territoire, Ilodyonisiens et visiteurs. Il permet à chacun d’échanger et s’informer en temps réel des événements concernant l’île et son territoire. Il offre également une visualisation du devenir du quartier en réalité augmentée et des informations sur l’histoire du site. Il est signalé par une balise lumineuse, un QR code géant intégré dans le mur acoustique et photovoltaïque de l’A86.
Le sentiment d’appartenance à l’île est très prégnant. Il sédimente les liens entre les habitants dont les origines et les nationalités sont multiples. Cette diversité et cette ouverture à l’autre prédominent par rapport au sentiment d’isolement.

Expérimentation in situ in vivo d’un prototype de QR Code photovoltaïque. © Agence Philippon-Kalt
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